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EDITORIAL – Les algorithmes du bonheur, la nouvelle religion diabolique

SAO PAULO – SAN FRANCISCO – Les algorithmes sont de plus en plus présents dans nos vies, surtout digitales. Par exemple si vous regardez une vidéo sur YouTube ou une série sur Netflix, le système va vous suggérer d’autres vidéos intéressantes à regarder par la suite. Dans le futur, des voitures sans pilote vous emmèneront peut-être en voyage ou à destination d’un lieu en faisant travailler un algorithme. Ces derniers sont de plus en plus basés sur des technologies dites d’intelligence artificielle (AI ou en anglais IA). Pour résumer l’AI a la capacité de trouver du sens, par exemple suggérer une vidéo, en se basant sur une analyse de millions ou milliards de données grâce à des méthodes de machine learning.  

Quel est le sens de ces algorithmes ?

Si on considère que la recherche du bonheur ou du plaisir continu est la nouvelle “religion globalisée”, il est fort probable que ces algorithmes de façon “inconsciente” soient basés justement sur le bonheur dans leurs recommandations. Par exemple, si vous êtes un fan de séries d’humour sur Netflix, le système va vous proposer d’autres séries ou shows sur le même sujet mais probablement pas un reportage sur la guerre en Syrie. Or, regarder des séries d’humour est totalement égocentrique, basé sur une recherche du plaisir pur un peu comme visualiser des films adultes (d’ailleurs de loin les sites les plus visités au monde, voir sur Similarweb.com). Je ne dis pas qu’il ne faut pas regarder des humoristes mais il faut faire attention aux excès. Par contre, un reportage sur la guerre en Syrie ou la pauvreté à Lausanne ou Genève peut vous faire (ré)agir.

Le danger

Et justement le danger est là. Selon moi et bien sûr d’autres intellectuels partagent cette vision, les algorithmes confortent notre personnalité au lieu de la défier. On peut dire que ces grandes plateformes comme YouTube ou Netflix ont de moins en moins un effet transformateur sur la société. Ils favorisent aussi une culture mainstream qui s’auto-alimente sous forme de bulles, car si justement la majorité des personnes sont à la recherche du bonheur et du plaisir, l’algorithme va comme contaminer les recherches pour que le client soit heureux et ceux qui aimeraient un algorithme qui les défient ou suivent leurs valeurs vont être très déçus. Pour que vous soyez un client heureux chez Netlflix (qui vit des abonnements) ou YouTube (qui vit de la publicité), l’algorithme ne doit pas vous proposer des suggestions trop radicales ou différentes de votre personnalité. N’oubliez pas, la nouvelle religion globalisée est le bonheur, le plaisir.

Le bonheur comme seul objectif ? Question de proportion 


C’est là que faire appel à la théologie chrétienne peut s’avérer intéressant. En effet, Jésus nous dit à travers les Ecritures qu’il faut qu’ “on porte notre croix”, autrement dit qu’on fasse un sacrifice continuel. L’Apôtre Paul dans Romains (12 : 2) explique que le christianisme doit transformer l’intelligence, être différent du monde actuel. Certains Chrétiens, probablement une minorité à cause de la difficulté d’être un vrai Chrétien, ne recherchent pas continuellement le bonheur sur terre mais travaillent pour le Royaume de Dieu (oui je sais on tombe très vite dans l’hypocrisie). Cela peut passer par se préoccuper activement de la guerre en Syrie (ex. récolte de fonds en Suisse), par lutter contre ses propres démons (alcool, jeux d’argent, films adultes), un travail de lutte contre la pauvreté ou un travail d’évangélisation. Dans ces situations décrites, le Chrétien essaie de porter sa croix sans être à la recherche de son bonheur ou propre plaisir, ou en tout cas pas seulement. Autrement dit, certains Chrétiens avancés sont dans une toute autre recherche qu’un bonheur continu. Il faut aussi noter qu’aucun Chrétien n’est parfait, nous ne sommes pas Jésus, et il y aura forcément des moments pendant la semaine où le Chrétien va rechercher son propre plaisir (ex. manger, boire, avoir des relations sexuelles, regarder la TV, écouter la radio) mais la question concerne les proportions entre “se servir” soi-même et les autres. Si par exemple on consacre la moitié de son temps à son propre plaisir et l’autre moitié pour servir les autres on peut être dans un certain équilibre sain. Le risque avec les algorithmes et qu’ils nous fassent augmenter les moments de son propre plaisir par recherche continuelle du bonheur au détriment d’aider et servir les autres. Est-ce à conclure que les algorithmes ont un côté diabolique ? Oui, car tout ce qui n’est pas de Dieu est du Diable. Certaines définissent le péché comme tout ce qui est contraire  Dieu.

L’avenir


Une idée serait de pouvoir soi-même, comme consommateur, pouvoir définir son propre algorithme de recommandation sur Netflix ou d’autres sites/entreprises en se basant sur ses propres valeurs. C’est-à-dire une sorte d’algorithme de l’algorithme, mais à la fin n’est-ce pas Dieu ? Oui, on est clairement en train de commencer à se prendre trop pour Dieu.

Mis à jour le 12 octobre 2022. Par Xavier Gruffat (fondateur du site Romanvie.ch, XG réside au Brésil. Il a habité par le passé en Californie et en Suisse). Crédit photo : Adobe Stock.
Sur une idée originale de Xavier Gruffat, non copié d’un autre site ou média.

“Si tout est manipulation, il est probablement préférable d’être manipulé par des journalistes – ou soi-même – que par des algorithmes.” Xavier Gruffat

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Observação da redação: este artigo foi modificado em 02.11.2022

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