Publicité

Théologie : mieux comprendre le molinisme – un possible pont entre le calvinisme et l’arminianisme pour les protestants et évangéliques

GENEVELe molinisme est une doctrine théologique, complexe, développée principalement par le jésuite Luis de Molina (1536 – 1600) sur la grâce divine et le libre-arbitre humain. Au 21ème siècle, cette doctrine influence autant le catholicisme que les mouvements évangéliques et protestants. Justement dans les milieux protestants et évangéliques, le molinisme peut être une sorte de compromis ou d’équilibre entre le calvinisme (souveraineté absolue de Dieu, prédestination) et l’arminianisme (valorisation du libre-arbitre). Au 20ème et 21ème siècle, certains grands philosophes vivants défendent le molinisme. Justement, le molinisme actuel est de plus en plus philosophique et pour certains avis critiques, notamment les calvinistes, peu théologiques.

Résumé – Concordia

Au cœur de la question essentielle de la controverse de la grâce, cette doctrine, aussi appelée Concordia, défend la possibilité d’une conciliation entre la liberté de l’homme et la prescience et grâce divines, comme le résume bien le site Wikipedia en français.

Connaissance moyenne de Dieu

L’idée de la connaissance moyenne de Dieu est une solution intermédiaire pour expliquer d’un côté la souveraineté totale de Dieu et de l’autre côté la liberté humaine. Pour le molinisme, Dieu sait ou connaît toutes les choses du monde mais Il n’influence pas toutes les choses. Même s’Il sait que toutes les choses vont se dérouler. Autrement dit, Dieu fixe les formes de la vie et les conditions de l’action ; l’homme est libre de se conformer à ces données pour son salut et il peut y consacrer sa volonté, et cela même si Dieu sait parfaitement par avance ce qui va advenir.

Trois moments logiques et exemples


Les molinistes présentent la connaissance de Dieu dans une séquence de trois moments logiques.
– Le premier est la connaissance de Dieu des vérités nécessaires ou connaissance naturelle. Ces vérités sont indépendantes de la volonté de Dieu et sont non-contingentes. On peut aussi dire que la connaissance naturelle est la connaissance de toutes les possibilités, car Dieu est parfait. Dans le détail cette connaissance inclut toute la gamme des possibilités logiques. Il s’agit par exemple d’affirmations telles que “Tous les célibataires ne sont pas mariés” ou “X ne peut pas être A et non-A en même temps, de la même manière, au même endroit” ou “Il est possible que X obtienne.” – La seconde est appelée connaissance moyenne, comme on l’a vu ci-dessus, et elle contient l’éventail des choses possibles qui se produiraient dans certaines circonstances. On parle de connaissance moyenne car elle se situe entre la connaissance naturelle et la connaissance libre. Par exemple si la créature libre A était placée dans la circonstance B, Dieu, par le biais de sa connaissance moyenne, saurait que la créature libre A choisira librement l’option Y plutôt que l’option Z. Et si la créature libre A se trouvait dans la circonstance C, Dieu, par le biais de sa connaissance moyenne, saurait que la créature libre A choisira librement l’option Z plutôt que l’option Y.
– Le troisième type de connaissance est la connaissance libre de Dieu. Ce type de connaissance consiste en des vérités contingentes qui dépendent de la volonté de Dieu, ou des vérités que Dieu réalise, qu’il n’a pas à réaliser. Il peut s’agir par exemple d’affirmations telles que “Dieu a créé la terre” ou de quelque chose de particulier à ce monde que Dieu a actualisé. C’est ce que l’on appelle la “connaissance libre” de Dieu et elle contient l’avenir ou ce qui va arriver.
Entre la connaissance naturelle et la connaissance libre de Dieu, il y a la connaissance moyenne (ou scientia media) par laquelle Dieu sait ce que ses créatures libres feraient en toute circonstance.

Base biblique, hypothèses

Le molinisme se base notamment sur le verset biblique qu’on trouve dans Matthieu 11:23 : « Et toi, Capernaüm, seras-tu élevée jusqu’au ciel ? Non. Tu seras abaissée jusqu’au séjour des morts, car si [conditionnel] les miracles accomplis au milieu de toi l’avaient été dans Sodome, elle subsisterait encore aujourd’hui. » Jésus a notamment fait ce reproche aux villes comme Capernaüm dans lesquelles avaient eu lieu la plupart de ses miracles, parce les habitants n’avaient pas changé d’attitude (lire Matthieu : 11:20). Le molinisme affirme que dans cet exemple de Matthieu 11:23, Dieu sait ce que ses créatures libres choisiraient dans des circonstances hypothétiques, à savoir que les Sodomites auraient répondu d’une manière telle que Sodome aurait encore existé à l’époque de Jésus, compte tenu de cette situation hypothétique. Matthieu 11:23 contient ce que l’on appelle communément un contrefactuel (dans le sens conditionnel) de la liberté des créatures. Mais il faut distinguer les contrefactuels de la prescience (prédestination). La Bible contient de nombreux exemples de prescience, comme dans Dt 31, 16-17, où Dieu annonce à Moïse que les Israélites abandonneront Dieu après leur sortie d’Égypte.

Molina

Le 16ème siècle a été riche pour la théologie chrétienne avec l’œuvre de Martin Luter qui commence en 1517 et un peu plus tôt aussi d’Erasmus sur le concept d’humanisme. Ce siècle a vu la naissance du protestantisme ainsi que la contre-réforme catholique.

Eloignement en tout cas en partie du calvinisme

Le molinisme s’oppose aux tenants stricts du Sola gratia, le salut par la seule grâce de Dieu, défendu par les calvinistes (réformés) ou les jansénites dans la droite ligne de Saint Augustin, peut-être le théologien qui a le plus influencé l’église chrétienne occidentale (catholique, protestante, évangélique). Pour rappel, les jansénites possèdent certains traits caractéristiques, comme la volonté de s’en tenir strictement à la doctrine de saint Augustin sur la grâce conçue comme la négation de la liberté humaine, pour faire le bien et obtenir le salut. Les Calvinistes, en français appelés aussi Réformés, sont aussi de facto très liés à la théologie de Saint Augustin et sont des adeptes de la fameuse doctrine de la prédestination (le Salut d’une personne est déjà déterminé par Dieu, de sorte qu’elle ne peut choisir autrement ou résister à la grâce de Dieu). Mais le molinisme diffère également de l’arminianisme, car il prétend que Dieu sait définitivement comment une personne réagirait au message de l’Évangile si elle était placée dans une situation particulière.

Mal vu du Pape

Le pape Clément VIII (1536-1605) se borna à interdire toute discussion ayant pour thème les théories développées par Luis de Molina.

Conclusion


Avec la doctrine moliniste, les partisans de la Connaissance moyenne considèrent qu’elle est compatible avec toutes les doctrines théologiques qui affirment que Dieu a une providence divine et que l’homme a une liberté libertaire (par exemple le calvinisme, le catholicisme, le luthéranisme), et qu’elle offre une solution potentielle aux préoccupations selon lesquelles la providence de Dieu empêche en quelque sorte l’homme d’avoir une véritable liberté dans ses choix.

Le 19 mai 2021. Source : Emissions en portugais de Vejam Só (lien YouTube ici : https://www.youtube.com/watch?v=VkBQs-LRlsA), pages Wikipedia en français et anglais sur Luis de Molina (et sa doctrine).

Est-ce que cet article ou dossier était utile ?

Observação da redação: este artigo foi modificado em 19.05.2021

Publicité